vendredi 22 avril 2016

HARDCORE HENRY

 



Le monde est injuste. On est entouré de gens qui ne manqueraient pour rien au monde la dernière daube Marvel ou DC et geignent pourtant à chaque fois devant le résultat : pas assez d'action, un concept pas super intéressant, un manque d'originalité... mais pas grave, on ne manquera pas d’y retourner la prochaine fois (je ne jette pas la pierre, je fais pareil).
Et d'un autre côté, lorsqu'une bombe comme Hardcore Henry sort, le film se retrouve sur 5 copies à Paris, fait trois entrées, et se fait démolir par la presse pour cause de débilité profonde... allez comprendre...
Hardcore Henry c'est pourtant le meilleur film de found footage jamais fait, le meilleur film de super héros hard boiled, le premier film d'action qui dépote de la première à la dernière image (mais pour de vrai), un croisement jouissif entre HypertensionUniversal Soldier 4 (le meilleur) le tout revu à la sauce Enter the void, un Frankenstein moderne filmé comme un jeu vidéo et pourtant blindé de références aux films noirs (de la femme fatale jouée par Haley Bennett, aux amazones guerrières qu’on croirait sorties de Sin City, en passant par le clin d’œil à Dark passage avec Bogart). Bref, un film d’action original qui respecte sa promesse immersive, ultra violent et pourtant plein d’humour (Sharlto Copley dans un one man show désopilant).
A tel point que s’il fallait pointer un aspect désagréable dans Hardcore Henry, ce serait peut-être une certaine prétention dissimulée derrière l’outrance hystérique et l'absence de morale. Vous aimez les super héros et l’action ? et bien voilà ce que c’est un super héros : un surhomme dénuée de conscience, de paroles, juste un mec plus fort que tout, à qui l’on va faire faire les trucs les plus improbables qui soient (et Dieu sait que parfois on écarquille les yeux en se demandant comment ils ont fait). Ce film, c’est un peu un gros doigt d’honneur à la face des amateurs de cinéma d’action dont le grand truc est de péter dans la soie, ceux qui se la jouent en nous faisant croire The Dark Knight est un film profond et intelligent. Ilya Naishuller et son producteur dingo Timur Bekmambtov (dont le supposé con Wanted met à l’amende les ¾ des superproductions hollywoodiennes) n’en n’ont rien à carrer de passer pour des intellos, mais d’une certaine façon, ils se sentent supérieurs dans leur folie à leur public pétri d’académisme et de débordements pourvu qu’ils soient contrôlés. Qu’ils en soient remerciés. Si Hardcore Henry est souvent fatiguant à regarder, c’est parce qu’il nous interroge sur nos pulsions scopiques d’ultra violence et leurs limites. Ses créateurs comptent avant tout sur notre intelligence là où ses concurrents veulent seulement nous la flatter pour nous endormir.
Et quant à ceux qui disent que c’est ennuyeux à force de bouger tout le temps et de tirer dans tous les coins… et bien on leur répondra ce que d’autres disaient dans un autre temps : « si c’est trop fort, c’est que t’es trop vieux ». FUCK YOU 

jeudi 21 avril 2016

GODS OF EGYPT d'Alex Proyas

 


Gods of Egypt est une version solaire de son Dark City - Rufus Sewell retrouve d’ailleurs son réalisateur, ici pour un second rôle d’architecte. Encore une histoire d’un humain aux prises avec des figures fantastiques (ici des Dieux égyptiens) manipulant la Terre et les hommes à leur guise comme un jouet avec lequel on expérimenterait. Mais à l’approche façon film noir de son glorieux opus, Proyas oppose cette fois ci un grand film d’aventure coloré et foutraque pour notre plus grand émerveillement. Disons-le tout net, Gods of Egypt est le blockbuster le plus excitant à regarder depuis…depuis très longtemps ! Le bon goût n’est pas de mise, malgré son budget pharaonique la production flirte avec le bis, mais qu’importe, le film est un festival de visions démentes enchaînées sans aucun répit : le monde des morts où Anubis emmènent les âmes errantes, le Dieu Râ menant sa barque céleste (montrée comme un vaisseau du type de celui d’Albator) affrontant le monstre Apophis, des serpents géants montés par des guerrières énervées, des pyramides piégées, des bastons homériques entre combattants vêtus d’armures ailées (Saint Seiya !), la disparition soudaine et choc d’un des personnages principaux emportées par des démons, des jolies filles aux poitrines subtilement mises en avant, des dialogues amusants, des personnages bien dessinés…mais qui n’a pas envie de voir ça ? Hein, qui ? D’ailleurs, plus qu’à un film hollywoodien, Gods of Egypt ressemble à une production Film Workshop et plus d’une fois, on pense à Legend of Zu de Tsui Hark (en plus compréhensible !). Gods of Egypt est le film qu'on aurait rêvé de voir à douze ans... mais qu'on est encore content de voir aujourd'hui !

lundi 18 avril 2016

Jem et les Hologrammes de Jon Chu (CRITIQUE)

The Runaways



Le critique de cinéma américain Matt Zoller Seitz a eu cette formule géniale à propos de Jem et les Hologrammes, comparant le film de Jon Chu à « Josie et les Pussycats filmé par Terrence Malick ». Au-delà de l’oxymore apparent que cette phrase induit, elle pointe précisément très précisément là où réside la beauté du film, dans sa lumière.  

Jem suit une trame très conventionnelle sans chercher spécialement à la rendre plus consistance ou plus crédible qu’à l’habitude, celle d’un apprenti groupe cherchant sa voie tandis qu’il se trouve pieds et poings liés aux mains de producteurs cyniques et mercantiles. Sans remonter jusqu’à Une star est né ou Phantom of The Paradise (dont il retrouve le glam dans son finale), la comédie pop anglo-saxonne a produit deux amusantes bandes dans les années 90, ledit Josie et les Pussycats et le méta Spice World – le film.  Jem pourrait compléter cette trilogie ne serait-ce par le personnage de Juliette Lewis, parfaite en directrice de label cynique et hystérique, mais là où Jem tranche par rapport à ses deux aînés, c’est par son traitement très différent de la couleur et du ton employé. Alors que les deux bonbons acidulés susnommés brillaient par leurs couleurs pastel et leur humour camp, Jem arbore un ton plus sérieux qu’on aurait pu l’imaginer et surtout le film se déroule essentiellement de nuit. Les sources de lumière sont le plus souvent à l’intérieur du plan (du moins en apparence). Ainsi, une chorale improvisée sous la jetée de San Monica (et oui, on peut encore penser à Terrence Malick et Knight of Cups où plusieurs scènes se déroulent au même endroit) est uniquement éclairée par le petit robot Synergy ; le premier concert de Jem est interrompu par une coupure d’électricité. Jem décide de poursuivre pourtant le show en demandant au public de l’éclairer avec les lampes torches de leurs téléphones, et s’empare d’une guitare sèche pour poursuivre sa performance. Bref, pour traduire la crise existentialiste de son héroïne s’interrogeant sur quel adulte être, le film choisit le mode acoustique, unplugged, d’où son atmosphère calme, ses mots chuchotés, ses voix off décrivant les doutes de son héroïnes, ces regards perdus dans le lointain, ces plongeons dans la mer dont on espère ressortir transformée (Terrence Malick encore !). Dans un entretien accordé aux Cahiers du cinéma, le réalisateur Jeff Nichols expliquait avec Midnight Special que les films de Malick se déroulaient surtout de jour pour utiliser la lumière naturelle, mais que lui voulait montrer à quoi ressemblerait ce genre d’esthétique, mais de nuit. Finalement, à la surprise générale, c’est Jon Chu qui aura réussi la démonstration.


PS : comme Jem fait tout pour que ses sœurs fassent partie du groupe au grand désarroi de sa productrice qui voudrait vendre une chanteuse solo, Jon Chu a retrouvé les « hologrammes » de sa webserie the L.X.D. :  Ryan Randels au scénario, Nathan Lanier a la musique originale, et la virtuose Alice Brooks a la photo.

vendredi 1 avril 2016

Un + Une femme fatale (DePalma & Lelouch)


Hasards et coïncidences en cascade, il y a du Claude Lelouch chez Brian de Palma. Les deux cinéastes partagent le gout des émotions intenses, des personnages à fleur de peau sans qu'il y ait forcément une grande attention à la crédibilité de ces personnages ; et une caméra en mouvement omniprésente.

Hasard et coïncidences (bis), Brian dePalma donnait cet après-midi une " master class" au festival de Beaune... la ville où Claude Lelouch vient justement d'installer ses "ateliers du cinéma". 

Claude Lelouch est parti en Inde filmer Un + Une, Brian de Palma était venu en France filmer son sublime Femme Fatale (2002). Deux cinéastes qui s'expatrient pour aller faire leur cinéma ailleurs comme s'ils étaient rester chez eux, la déterritorialisation apportant malgré tout une fine couche d'étrangeté supplémentaire.

Lelouch et De Palma aiment les rêves enchâssés, l'onirisme, les ambassadeurs, les femmes d'ambassadeurs, les histoires d'amour et de jalousie, les récits improbables, les mises en abyme (une affiche pour un film intitulé Déjà vu parcourt Femme Fatale ; dans Un + Une c'est un livre qui porte le titre du film - ou l'inverse ! - que les personnages s'échangent) ; les trompes l'oeil (dans Un + Une, il y a un film dans le film intitulé Juliette et Roméo, dans Femme Fatale le trompe l’œil prend la forme d'un montage photo)... Alors quand on voit Un + Une, on ne peut s'empêcher que ça ferait un super double programme avec Femme Fatale.


Ambassadeurs

 
Christophe Lambert

Peter Coyote

Dans l'avion




Des colonnes Morris comme des phares dans les rêves




Femmes armées dans scènes de rêve



Jusqu'au même cadreur !