mardi 13 mai 2014

Chris Marker vu par Catherine Belkhodja








Dernier entretien... celui avec la belle Catherine, à jamais Laura dans Level 5 de Marker...


Catherine Belkhodja fut la muse de Chris Marker. Héroïne de Level Five, elle apparait dans nombre de ses autres œuvres (Berliner Ballade, l'installation Silent Movie, L'héritage de la chouette, le clip Getting Away with it d'Electronic).

Chris Marker, de son vivant, ne voulait plus que certaines de ses œuvres soient montrées. Avec cette rétrospective Marker qui montre tout, ses volontés sont un peu cavalièrement piétinées non ?
Je n’ai pas encore reçu la programmation, mais il est assez probable que parmi les films sélectionnés, figurent certains films que Chris ne souhaitait plus montrer pour de multiple raisons. Parfois tout simplement parce qu’ avec le recul, il ne voyait plus les choses sous le même angle, ou du moins , il ne souhaitait plus présenter les choses de la même façon.
D’autres fois, c’était par simple excès de modestie : Chris a toujours été d’une grande exigence : Il retravaillait ses mots, ses phrases, ses tournures avec beaucoup de soin et d’acharnement. Quand il avait des réserves, il ne voulait pas montrer son travail. Mais quand il condescendait à montrer ce qui lui semblait mauvais ou inachevé, il y avait aussi des choses très belles.
Ainsi, Chris m’avait toujours interdit de lire son roman. Pour lui, c’était un péché de jeunesse sans intérêt. Je n’avais même pas imaginé désobéir  car j’aurais eu l’impression de pénétrer dans la pièce interdite de Barbe Bleue. Je n’avais même  jamais cherché à me procurer cet ouvrage.
Un jour pourtant, j’ai été confrontée à un dilemme : le festival de la Charrière à Lille m’avait invitée à présenter des films de Chris et à animer des débats,  ce que j’avais accepté avec plaisir. Mais Louisette, Fareniaux, la fondatrice et directrice du festival, tenait beaucoup à ce que je lise un extrait de ce roman : « Le cœur net »
J’étais partagée entre l’envie de découvrir cet ouvrage, et l’injonction de Chris. Je m’en étais sortie avec une pirouette : « l’ouvrage était épuisé et je n’avais aucun exemplaire du livre. » Mais rapidement, j’ai reçu en cadeau un très joli exemplaire relié en cuir. Je n’avais pas d’autre alternative que d’accepter, sous réserve de choisir un extrait qui me conviendrait. J’avais assuré mes arrières en négociant à l’avance que si je n’aimais pas l’ouvrage, je lirais alors un extrait du « Dépays ». Ce superbe texte devait déjà faire l’objet d’une  lecture avec Etienne Sandrin au Couvent des Bernardins, au printemps prochain.
J’ai donc lu « Le cœur net » dans le train pour Lille. J’étais stupéfaite  et bouleversée de découvrir dans cette œuvre de jeunesse, tous les ingrédients déjà de son futur film : La jetée.
Chris a totalement sous-estimé son premier -et dernier - roman.
Ce qui me choquerait davantage, en revanche, ce serait de découvrir dans l’exposition des documents plus confidentiels. Certains constituaient des pistes de travail et n’étaient pas faites pour être montrées dans l’état. Chris était un chercheur et un créateur infatigable. Certains secrets de cuisine doivent rester ses  secrets mais je me réjouis que ses films soient montrés à un public plus élargi, lorsque c’est dans l’esprit du respect de l’auteur. A signaler, l’excellent travail cet été de Potemkine , lors de la nouvelle sortie du Joli mai, auquel les exploitants ne croyaient pas beaucoup , mais qui a passé la barre des 50 000 entrées.

Avant de rencontrer Chris Marker, connaissiez vous ses films ?
Je connaissais bien sûr la Jetée, mais je ne connaissais pas encore toute la cosmogonie Chris Marker.

Dans quelles circonstances l'avez-vous rencontré ?
J’avais à peu près 16 ans quand je l’ai rencontré Chris. Dominique Païni, qui n’était pas encore directeur de la Cinémathèque française, organisait régulièrement des stages d’initiation au cinéma pour PEUPLES ET CULTUREs. Ces stages accessibles à tous les jeunes permettaient de découvrir des œuvres rares, suivies de débats avec les auteurs.
C’était absolument formidable ; On habitait tous dans une grande maison, on voyait des films magnifiques et on en parlait ensuite pendant des heures. Je retrouvais l’ambiance passionnée de la Cinémathèque d’Alger que j’avais fréquentée durant toute mon enfance.
Chris était venue présenter L’Ambassade et nous avions longuement parlé ensuite de son film et du Château de l’araignée de Akira Kurosawa.  Chris a toujours eu une fascination pour Shakespeare.

Je l’ai vu disparaître sur sa moto et nous ne nous sommes pas revus pendant quelques années.
J’ai de nouveau entendu parler de lui en 86, au moment de l’émission TAXI que je présentais sur la Sept. J’interviewais des personnalités dans une grande Cadillac noire. Le producteur de l’émission  Philippe Alfonsi était très fier de m’annoncer que nous avions un véritable fan : C’était Chris. Cela m’avait fait vraiment plaisir. Chris a toujours été un spectateur actif, donnant son avis très tranché sur les programmes.
Nous nous sommes retrouvés par le biais de la philosophie : Je participais à la création du journal « la légende du siècle » dirigé par Roland Castro. A l’époque, je cherchais à vendre le concept d’une émission de philosophie avec mon co-auteur Marc Sautet, avec qui nous avions lancé les premiers café-philos. Nous avions présenté le concept à plusieurs producteurs mais aucun ne voulait se lancer dans cette aventure. J’avais contacté aussi Jean Pierre Ramsay, qui avait invité Chris à se lancer dans «  l’héritage de la chouette »
J’ai revu Chris par hasard à la Bastille et nous ne nous sommes plus quittés ! On se promenait dans Paris et Chris me montrait les endroits qu’il aimait. On parlait beaucoup et on s’écrivait. Lui, des lettres très courtes , toujours pleines d’humour et d’esprit. Moi, des lettres très longues .
Il tenait beaucoup à ce que je participe au banquet de Platon dans L’héritage de la chouette. J’y fais effectivement une furtive apparition, vêtue d’une longue robe  où je ponctue les discours d’une note pincée sur une lyre. Chris avait fait beaucoup de photos sur cette première séquence et me disait en riant que Simone Signoret avait commencé sa carrière  en faisant une brève apparition dans les Enfants du Paradis ! L’héritage de la chouette est un monument qui a failli disparaître car Onassis s’opposait à sa diffusion. Chris a dû faire un procès, qu’il a gagné, pour sauver sa série.

Que disait-il de vous ?
Chris me disait que pour lui, j’étais une héroïne évadée d’un livre de Giraudoux. Il me disait que mes dialogues étaient du pur Giraudoux.

Il est vrai qu’avec lui, je me sentais totalement sur la même longueur d’onde et  qu’il m’avait adoptée telle que j’étais. Nous parlions de grandes choses mais beaucoup aussi des petites choses, qui n’intéressent pas toujours les communs des mortels. Je lui envoyais mes textes , mes images, mes photos. Par la suite, il m’a appris à tenir une caméra et je lui ai montré mes premiers bouts d’images. Des reportages ou des petits films inclassables avec de longs monologues assez loufoques sur la vérité ou sur les nuages. Des petites démonstrations philosophiques avec une certaine rigueur logique, à la limite de l’absurde.Chris aimait beaucoup ces petits films et il en avait intégré certains extraits dans Zapping Zone. Il aimait regarder mes rushs et me faisait l’honneur de les pirater parfois, car Chris revendiquait le pillage comme un art à part entière. Il m’a aidée aussi au montage de quelques vidéos , des petits films d’art assez confidentiels, que je présentais dans mes expositions. Il tenait beaucoup à conserver mes originaux, car il craignait qu’ils tombent dans la quatrième dimension.
Par la suite, Chris m’a fait tourner dans  Getting away with it.
C’était une commande du producteur Michael Shamberg, très connu dans la sphère underground New-Yorkaise : Il aimait faire appel à ses nombreux amis artistes pour des projets toujours un peu décalés. D’ailleurs lui – même est devenu curator, puis artiste lui aussi avec des expositions collectives dans différentes capitales du monde, regroupées sous le label TURTLE. Mikael avait invité Chris à faire le clip de New Order mais Chris voulait sortir des studios, et ne pas se contenter de filmer le groupe en studio. Comme Chris adore les animaux, il avait choisi de filmer dans le Château de Sauvage, au milieu des émeus et des wapitis.
Le chef opérateur était Yves Angelo. Ce n’était pas simple pour moi de me laisser approcher par les émeus. Par la suite, le groupe a commandé un autre clip car les musiciens pensaient que dans le clip de Chris, on ne les voyait pas assez…
Sur ma demande, Chris avait établi une autre version du clip, colorisée et stylisée. C’est une version assez difficile à trouver. Ma copie est restée dans les cartons de Chris et fait partie des objets qui ont mystérieusement disparus et qu’on recherche encore.
Par la suite, Chris a utilisé certaines images du Château de Sauvage pour les intégrer dans Level Five.    

En 1996 sort Level Five, dont vous être l’héroïne, Laura, où vous passer tout le film assise, filmée en gros plan, à vous adresser à la caméra…
Il avait eu l’idée de ce projet dix ans auparavant et avait égaré l’unique exemplaire  du scénario dans un restaurant. Il avait perdu aussi l’envie de ce film. Quand nous nous sommes revus, il m’a dit qu’en me retrouvant il avait eu immédiatement l’intuition qu’il avait trouvé  « Laura » et cela lui a redonné de l’impulsion pour reprendre ce projet auquel il tenait beaucoup. (En dehors de la Jetée, qui était sa première fiction, il voulait faire Level five, qui serait sa deuxième et dernière fiction).
Il m’a proposé le rôle quelque temps plus tard, tout en me demandant de patienter car j’étais encore trop jeune pour interpréter ce personnage. Pour moi, «  demain «  a toujours été très improbable : je ne vivais qu’au présent ! Par la suite, j’étais très surprise et ravie quand ce projet de film s’est finalement concrétisé.
Nous avons commencé à tourner ensemble avec la maison de production KAREDAS que nous avions crée ensemble. Au début, c’était un tournage très rudimentaire : nous avions peu de moyens car nous n’avions pas encore  trouvé de coproducteurs mais c’était aussi un choix esthétique de la part de Chris. Par la suite, ARGOS et ASTROPHORES sont venus compléter la production du film qui a ensuite été acheté par ARTE.
C’était un peu étrange car Chris avait aussi commencé à tourner en même temps quelques images pour Silent Movie (une installation vidéo en noir et blanc) et je ne faisais pas toujours la distinction entre les deux. Au tout début, Chris ne me montrait pas ses images. Les choses se sont décantées au fur et à mesure, quand Chris m’a donné les premiers textes …
Silent Movie était une installation en hommage au cinéma et aux actrices du cinéma muet.  J’étais la seule personne contemporaine parmi les images du passé. J’ai pu voir pour la première fois les extraits de Silent movie sur grand écran, lors de la soirée d’hommage à Chris organisée en septembre 2012 par la Cinémathèque. C’était pour moi totalement bouleversant, et absolument magique …
Nous étions en tête à tête sur le tournage. Cela reste pour moi des moments très privilégiés. C’était difficile d’avoir une vue d’ensemble. Chris aimait le secret et ne me disait pas grand chose sur le synopsis. Il me parlait de l’histoire du Japon, de la guerre, me demandait de regarder des films comme Laura d’Otto Preminger… Mais je ne connaissais rien de l’histoire du film.
Quand je tourne j’aime bien savoir comment sera le cadre, ça me permet de concentrer mon énergie en sachant quelle partie de moi sera à l’image. Là je ne savais pas : Il était très directif : J’étais cadrée très serrée et je ne pouvais pas beaucoup bouger. A la fin, il acceptait de me montrer le cadre pour que je puisse adapter mon jeu en fonction du cadrage.
Parfois, je regrettais de n’avoir pas de personnage vivant en face pour me donner la réplique. Mais il fallait que je m’adresse à mon "amour mort"  et Chris ne voulait pas faire diversion pour faire exister ce lien indélébile entre une femme et son amour défunt. Je craignais de lasser, d’ agacer les spectateurs. Je me disais que les gens supporteraient de me voir ainsi quelques minutes mais pas plus.
A l’époque, Solveig Dommartin avait reçu des critiques sévères car on lui reprochait son omniprésence à l’écran dans Jusqu’au bout du Monde, de Wenders. Je m’attendais à subir les mêmes pamphlets…

Level Five parle du web, des avatars, de se perdre sur la toile… Comme on dit, c’est un film précurseur, non ?
Chris a toujours été en avance. Il vivait sobrement et fuyait les fêtes et les mondanités mais ne savait pas résister aux gadgets. La technologie le fascinait. Il devenait comme un petit garçon devant un nouveau gadget ou un nouvel ordinateur.
C’est lui qui m’a offert mon premier minitel. Il m’envoyait des lettres mais ce n’était pas mon truc à l’époque : je perdais les codes, les lettres. Cela l‘agaçait beaucoup car ainsi, j’ai perdu ainsi beaucoup de son courrier. 

Vous ne saviez rien, ou peu de choses du film. Quelle fut votre réaction lorsque vous l’avez découvert fini ?
Le film m’a bouleversée.  C’était un véritable coup de poing. L’histoire est terrible : tous ces gens qui se sont suicidés… La réflexion sur le pouvoir des images et la manipulation qui en découle est très subtile. Quand j’ai découvert le film, j’ai fait totalement abstraction de ma présence dans ce film. J’étais une spectatrice comme les autres, en état de choc.
Mais j’ai de suite adoré ce film. La seule scène qui m’avait un peu gênée, c’est celle où je dialogue avec le perroquet. C’était une improvisation assez longue au départ. Pendant le montage, j’avais demandé à Chris de la raccourcir un peu, et il avait fini par accepter.

On entend la voix de Marker, ce qu’il ne faisait plus depuis des années, laissant des comédiens lire ses textes…
J’avais insisté pour qu’il prête sa voix au film. Sa voix sourde est très touchante et donne de l’émotion au film. Dans ses autres films, il préférait engager des acteurs avec une excellente diction.

La fin du film est assez prémonitoire. J’ai appris la mort de Chris de façon totalement accidentelle, par une amie qui m’envoyait ses condoléances sur facebook. J’ai cru à une mauvais blague car depuis les longtemps, les gens affirmaient qu’il était mort ! Mon premier réflexe a été de l’appeler sur son téléphone pour lui demander s’il était mort. C’est absurde je sais… Je me suis adressé à Chris comme l’héroïne de Level Five parle à l’homme absent. J’espérais qu’il me dise « non, je ne suis pas mort » ou bien « je suis mort mais ne t’inquiète pas ». J’ai découvert sa mort dans les journaux. C’était assez cruel.Chris avait prévu que cela se passerait ainsi.

Les textes écrits par Marker (de son roman aux livrets de DVD, aux voix off de ses films bien sûr) sont merveilleux, c’était un grand écrivain.
Il refusait qu’on le considère ainsi. Il me disait qu’il lui fallait des mois pour écrire deux phrases. Il y revenait tout le temps pour couper / réordonner / raccourcir, le contraire de moi qui écris souvent d’un seul jet. Quand on me demande de retravailler le texte, souvent je précise des choses et le texte est encore plus long ! Il disait qu’en fusionnant, nous pouvions aboutir au bon équilibre !

Chris Marker ne voulait pas parler pour laisser ses œuvres s’exprimer. Sauf qu’à force d’absence et de propos savamment distillés, d’avatar divers et variés, de pseudonymes, il a fini par devenir un personnage fascinant et quasi-romanesque. En avait-il conscience ? 
Sa manie des pseudos vient de la guerre où, m’a-t-il dit, il fallait changer d’identité souvent, par sécurité. Je pense aussi qu’il avait beaucoup de pudeur et n’aimait pas étaler sa vie privée. Il avait une relation très spéciale avec notre chat «  Guillaume en Egypte ». Il lui pardonnait quelques vanités !
Au départ, c’était involontaire. A la fin c’est devenu un peu une coquetterie. Je crois qu’il était content de cette médiatisation dans la dernière période (disons à l’époque de la sortie de Chats Perchés en 2004), mais il ne l’assumait pas.
Il a beaucoup voyagé surtout dans la première partie de sa vie.
Ensuite, laisser courir ce bruit était bien commode pour écarter ceux qui l’importunaient. Il aimait dire laisser courir le bruit qu’il était qu’il était à Moscou ou ailleurs alors qu’il était à Paris. Et puis ça laissait un répit pour répondre aux trop nombreux messages laissés sur son répondeur. 

Parlez-nous de lui…
C’était un homme passionné et passionnant, curieux de tout. Un véritable humaniste, en phase avec son siècle. Il parle autant aux personnes de sa génération, qu’à de jeunes lycéens. Il avait  une culture immense, et une mémoire stupéfiante, avec toujours des anecdotes incroyables à raconter. Mais il savait aussi être à l’écoute de ses amis. Par contre, il ne supportait pas les bavardages et pouvait devenir assez tranchant pour renvoyer ceux qui le dérangeaient. Il avait une notion très précise du temps car il avait encore beaucoup d’idées à exploiter et craignait de ne pas pouvoir terminer ses recherches.
Il savait précisément ce qu’il voulait. Ainsi pour Level five, il avait conçu lui même le dossier de presse et l’affiche et ne supportait pas la moindre modification quand il donnait des consignes. Sinon, il pouvait se fâcher très fort. Quand il se fâchait avec quelqu’un, c’était irrémédiable. Ce n’était pas quelqu’un de facile, il avait ses têtes. Il pouvait faire preuve d’une ironie glaçante. Il pouvait être très véhément pour des choses simples. Quand il entendait à la TV des présentateurs faire des fautes de français, il envoyait des missives sévères à la chaine.
Il s’est fâché deux fois avec moi mais heureusement cela n’a pas duré longtemps !
Sur son répondeur, son message disait « si vous avez quelque chose de gentil : d’amusant ou d’essentiel » et souvent, il ne décrochait pas : il attendait de savoir ce qu’on avait à lui dire.
Le téléphone n’arrêtait pas de sonner. On lui proposait de venir à des festivals, participer à des jurys. Les gens se bousculaient pour lui montrer leur film, leur scénario. Mais il refusait de donner son avis car il n’avait pas le cœur de dire ce qui lui semblait  mauvais. Cela ne l’a pas empêché de défendre spontanément des films qu’il aimait comme Demi-Tarif d’Isild Le Besco par exemple. Mais il fallait que ça vienne de lui.  
Il était très sensible à la gentillesse, au charme, à la discrétion, qualités qu’il retrouvait chez les japonaises. Il était plus indulgent pour les femmes dont il appréciait la compagnie. Pour les hommes, il les supportait plus difficilement : il fallait qu’ils soient vraiment brillants intellectuellement ou artistiquement, ou qu’il ait besoin de travailler avec eux. 

Comment pourrions-nous définir Chris Marker ?
Il me disait, « je suis un voyageur ». 

Et vous, comment le voyez-vous ?
Je l’ai toujours considéré comme un génie, un homme curieux de tout avec une très belle âme. J’ai eu beaucoup de chance de le rencontrer et ce que nous avons partagé ensemble reste très précieux.  Nos rires, nos souffrances aussi parfois, nos espoirs, nos projets et même nos indignations. Il a emporté avec lui une partie de mon être. Il me manque terriblement. 

Propos recueillis par Nikola et remis en forme par Catherine Belkhodja.

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