samedi 30 mars 2024

BREEZY de Clint Eastwood

 

Le seul coup de feu de ce film, c’est un petit blondinet à la coupe au bol qui le tire ; mais c’est avec son pouce et son index qu’il mime le révolver imaginaire et « abat » William Holden. L’acteur de La Horde Sauvage fait semblant de tomber pour jouer le jeu. Dans Breezy, nul fracas des armes, seulement le bruissement doux et mélancolique de l’amour dont la naissance est le premier signe annonciateur de sa fin. Clint Eastwood, dès son troisième film, affichait déjà un visage sentimental et il jouait dans certaines scènes la carte à fond, c’est-à-dire en baignant d’une musique sirupeuse signée Michel Legrand une déambulation sur la plage avec chien et regard perdu vers l’horizon pour noyer la tristesse d’une séparation. La structure de Breezy est celle d’une comédie romantique traditionnelle, rencontre-rupture-retrouvailles, mais Eastwood abandonne cette mécanique codifiée pour offrir un conte moral, dépourvu de la moindre péripétie, et il se concentre sur l’intensité des rencontres entre ces deux êtres que rien ne devait rapprocher (et la beauté de leurs corps à deux âges de la vie - Holden et Kay Lenz sont magiques) et les paradoxes existentiels de tout être humain (les personnages secondaires, l’ex-épouse ou le confident moustachu sont également très réussis). Breezy est en ce sens l’envers du misogyne Play misty for me, les deux partageant paradoxalement la même scénariste. Décédée à l’âge de 48 ans, en 1978, Jo(yce) Heims est le cœur battant de ce film aussi sensible que le précédent était manichéen, et ses dialogues émerveillent à chaque scène par leur intelligence, leur beauté, leur richesse, quand ils ne provoquent pas une épiphanie. Le dialogue de la fin, lorsque les deux amants se retrouvent, nous laisse toujours sur le carreau.

2 commentaires:

  1. Main (dés)armée reprise de manière douce-amère par la coda de Mystic River
    Un frisson dans la nuit film misogyne ? Plutôt film masochiste, contemporain et parallèle aux Proies de Siegel
    Mademoiselle Lenz revue ensuite ici :
    https://lemiroirdesfantomes.blogspot.com/2020/07/house-good-morning-vietnam.html

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  2. Steve Miner, deux trois bandes fabuleuses, dont ce House et le deuxième Vendredi 13. A good "Lenz"

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