Scandale est rapide comme l’éclair, comme s’il
avait été tourné à toute allure, et pourtant dense dans le nombre
d’informations qu’il parvient à véhiculer sans effort apparent. François
Truffaut aurait dit que c’est un film « tourné de la main gauche »,
soit tout l’inverse de ce genre de docu-dramas souvent plombés par leur esprit
de sérieux. Scandale retrouve la
vibration de ces films des années soixante-dix comme ceux de Michael Ritchie (Votez Mc Kay !) ou Martin Ritt (Norman Rae), qui eux même avaient été
jugés à l’époque, comme Scandale l’a
souvent été, «insuffisamment mis en
scène».
« Insuffisament
mis en scène » un film qui montre comment le sexisme et harcèlement sont
un poison qui se distille au quotidien et modifie inéluctablement les rapports
humains ? Insuffisament mis en scène un film qui montre comment les femmes
sont sommées de se conformer à un stéréotype et choisit pour cela un casting
puissamment théorique (Margot Robbie, Charlize Theron, Nicole Kidman comme
trois incarnations à trois âges différents du même canon esthéthique) ?
« Insuffisamment mis en scène » un film qui montre comment on demande
aux femmes de changer leur apparence quand les puissants se drappent des
oripeaux de la bienséance alors qu’ils usent de leur pouvoir pour obtenir un
droit de cuissage comme aux temps les plus reculés de l’Histoire ?
Scandale est un film rentre-dedans qui ne se
cache pas derrière son petit doigt, montre la complexité de jauger la limite
entre arrivisme et abus (sachant que l’abus arrive parce que certains utilisent
l’ambition des autres comme d’un levier pour assouvir leurs pulsions ), qui ne
se présente pas comme beaucoup de films du genre avec une vérité toute prête à
laquelle le public est acquise et que le propos sera de convaincre des méchants
de fiction du bien fondé d’un jugement que personne ne remettait plus en cause.
Au contraire, Scandale prend le parti
de montrer comment une vérité aussi évidente peut-être longue et complexe à
prouver et à mettre en lumière.
Et de se dire
rétrospectivement qu’Austin Powers était déjà une satire
irrésistible du machisme de certains hommes.